La reconnexion de circuits neuronaux exige du doigté
Par Katherine Gombay,ĚýMcGill Salle de presse
Une nouvelle technique pourrait permettre de rétablir les connexions neuronales chez les personnes présentant des lésions du système nerveux central
Cet objet microscopique qui ressemble Ă un cheveu et se dĂ©place Ă l’écran est en fait un neurone en voie d’être crĂ©Ă© par des scientifiques. Une Ă©quipe dirigĂ©e par des chercheurs de l’UniversitĂ© McGill et de l’Institut neurologique de MontrĂ©al a rĂ©ussi Ă crĂ©er, pour la première fois, de nouvelles connexions fonctionnelles entre des neurones. Rien ne distingue ces neurones artificiels des neurones qui se dĂ©veloppent naturellement dans notre corps, si ce n’est leur croissance au-delĂ de 60Ěýfois plus rapide.
«ĚýIl s’agit d’une dĂ©couverte passionnante, car le système nerveux central ne se rĂ©gĂ©nère pasĚý», affirme MontserratĚýLopez, boursière postdoctorale Ă McGill qui a consacrĂ© quatre annĂ©es Ă la conception, au perfectionnement et Ă l’essai de cette nouvelle technique. «ĚýNotre dĂ©couverte pourrait permettre de mettre au point de nouveaux types d’interventions chirurgicales et de traitements destinĂ©s aux personnes prĂ©sentant des lĂ©sions ou des maladies du système nerveux central.Ěý»
ĚýLĂ©gendeĚý: Des chercheurs de l’UniversitĂ© McGill ont rĂ©ussi Ă crĂ©er artificiellement des neurones fonctionnels dont la croissance est au-delĂ de 60Ěýfois plus rapide que celle des neurones naturels. Cette vidĂ©o montre la crĂ©ation d’un circuit neuronal fonctionnel, oĂą un segment de neurone fixĂ© Ă une petite bille est lentement Ă©tirĂ© afin d’être connectĂ© Ă un autre neurone.
La reconnexion de circuits neuronaux exige du doigté
Puisque la taille d’un neurone ne représente qu’un centième environ du diamètre d’un cheveu, les chercheurs doivent recourir à des instruments très spécialisés et à de nombreuses manipulations extrêmement délicates pour créer des connexions neuronales fonctionnelles capables de transmettre les signaux électriques comme le font les neurones naturels.
Les chercheurs ont utilisé un microscope à force atomique pour attacher une minuscule bille de polystyrène (de quelques micromètres de diamètre) à un segment de neurone agissant comme transmetteur qu’ils ont ensuite étiré, comme s’ils avaient tiré sur un élastique, pour le connecter avec le segment du neurone servant de récepteur.
«ĚýNous n’aurions jamais pu faire cette dĂ©couverte si les techniciens de laboratoire n’avaient pas rĂ©alisĂ© qu’il fallait absolument Ă©viter les mouvements brusques ou rapides en dĂ©plaçant les neurones nouvellement crĂ©Ă©sĚý», prĂ©cise PeterĚýGrutter, professeur de physique Ă McGill et auteur en chef de l’article publiĂ© la semaine dernière dans la revue scientifique . «ĚýJusqu’à ce qu’on trouve la bonne façon de transporter les neurones dans l’enceinte du laboratoire, du microscope Ă l’incubateur oĂą ils passent 24Ěýheures Ă se dĂ©velopper, nous ne parvenions pas Ă les faire se comporter comme nous le voulions.Ěý»
​Figure 1 Mechanically pulled connection between two neurons. Left: before, right: after manipulation
Lâcher prise n’est pas toujours chose facile
Un défi encore plus grand attendait les chercheurs après qu’ils eurent réussi à créer des connexions neuronales fonctionnelles. Il leur fallait en effet trouver le moyen de détacher les nouveaux neurones de l’instrument qui avait servi à les créer sans toutefois les détruire. Les chercheurs ont finalement trouvé la bonne technique pour séparer ces deux éléments et préserver le neurone fonctionnel en relâchant les billes de polystyrène.
Bien qu’il soit maintenant possible de créer de nouvelles connexions neuronales, il reste encore beaucoup à faire.
«ĚýLes neurones que nous avons crĂ©Ă©s mesuraient un peu moins de 1Ěýmillimètre, car nous Ă©tions limitĂ©s par la taille du dispositif expĂ©rimental que nous utilisionsĚý», explique la neuroscientifique MargaretĚýMagdesian, auteure principale de l’article, qui travaillait Ă l’Institut neurologique de MontrĂ©al lorsque ces travaux de recherche ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s. «ĚýCette technique pourrait Ă©ventuellement nous permettre de crĂ©er des neurones mesurant plusieurs millimètres, mais il faudra pousser la recherche plus loin afin de dĂ©terminer si ces connexions neuronales obtenues par micromanipulation diffèrent des connexions naturelles et, si c’est le cas, en quoi elles sont diffĂ©rentes.Ěý»
L’article «ĚýRapid Mechanically Controlled Rewiring of Neuronal CircuitsĚý», par M.ĚýH.ĚýMagdesian et coll., a Ă©tĂ© publiĂ© dans le .
DOIĚý:10.1523/JNEUROSCI.1667-15.2016
Cette Ă©tude a Ă©tĂ© financĂ©e par le Programme de subventions Ă la dĂ©couverte du Conseil de recherches en sciences naturelles et en gĂ©nie du Canada, l’UniversitĂ© McGill, une allocation de recherche JamesĚýMcGill, le Regroupement quĂ©bĂ©cois sur les
matĂ©riaux de pointe du Fonds de recherche du QuĂ©becĚý‒ Nature et technologies, une subvention Ă la formation des Instituts de recherche en santĂ© du Canada, ainsi que par une subvention offerte dans le cadre du Programme de formation orientĂ©e vers la nouveautĂ©, la collaboration et l’expĂ©rience en recherche (FONCER) du Conseil de recherches en sciences naturelles et en gĂ©nie du Canada.