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Le rythme, une question de perception

Notre perception des sons en deux dimensions donne vie au rythme
±Ê³Ü²ú±ô¾±Ã©: 8 July 2021

Les scientifiques savent depuis longtemps qu’à l’écoute d’une suite de sons, une personne perçoit souvent un rythme, même si les sons sont identiques et à intervalles réguliers. Il y a plus d’un siècle, on définissait la loi iambo-trochaïque : lorsqu’un son sur deux est fort, nous avons tendance à entendre les sons par paires avec accentuation en position initiale. Lorsqu’un son sur deux est long, nous entendons les sons par paires avec accentuation en position finale. Mais pourquoi?

Dans une étude publiée récemment dans , Michael Wagner, professeur à l’Université McGill, explique que le rythme que nous percevons est le résultat de deux décisions que nous prenons pendant l’écoute, l’une concernant le groupement (quelles syllabes ou tonalités se regroupent) et l’autre la proéminence (quelles syllabes ou tonalités semblent à l’avant-plan ou à l’arrière-plan). Ces décisions influent l’une sur l’autre.

Les résultats de recherche pourraient approfondir notre compréhension du traitement de la parole et du langage et avoir des retombées dans de nombreux domaines, notamment l’enseignement, l’orthophonie, la parole synthétisée et les systèmes de reconnaissance de la parole.

Entretien avec Michael Wagner

Que savent les scientifiques à propos de notre perception du rythme?

Souvent, nous avons l’impression que les tonalités et les syllabes forment des groupes rythmiques. C’est le cas même si toutes les tonalités et syllabes d’une séquence sont phonétiquement identiques et se succèdent à intervalles réguliers. Dans une séquence de sons par ailleurs identiques, un auditeur aura tendance à percevoir une série de ³Ù°ù´Ç³¦³óé±ð²õ (paires de sons avec accentuation sur le premier son) lorsqu’un son sur deux est plus fort, et à percevoir une série de iambes (paires de sons avec accentuation sur le deuxième son) lorsqu’un son sur deux est plus long.

Depuis sa découverte par Thaddeus Bolton en 1894, ce principe a été repris dans de nombreux travaux, notamment dans des études sur l’acquisition du langage chez les enfants. Aujourd’hui, nous cherchons à savoir si la loi iambo-trochaïque de Bolton est un phénomène universel ou si elle est attribuable à l’expérience linguistique. Même si le phénomène est connu depuis plus d’un siècle, sa source n’a toujours pas été établie avec certitude.

Qu’avez-vous découvert?

Nous avons constaté que ces perceptions rythmiques n’étaient pas réellement des iambes ou des ³Ù°ù´Ç³¦³óé±ð²õ. En présence d’un stimulus, nous prenons deux décisions distinctes : l’une au sujet du groupement, ou de la façon dont nous décomposons le signal en plus petites parties, et l’autre au sujet de la proéminence, c’est-à-dire la détermination des sons qui sont en avant-plan et de ceux qui sont en arrière-plan. Ensemble, ces décisions forment notre intuition rythmique et elles influent l’une sur l’autre, tout comme notre système visuel évalue la taille d’un objet et la distance à laquelle il se trouve. Si nous estimons qu’un objet est proche, nous déduisons qu’il est en réalité plus petit que s’il était éloigné. Cette perception peut donner lieu à des cocasses, comme la photo de la tour Eiffel : nous savons que la tour est grande et qu’elle semble petite parce qu’elle est éloignée; pourtant, le fait que la fillette semble toucher son sommet la fait paraître petite et proche.

D’après les résultats de l’étude, ce sont ces types d’interférences qui font en sorte que lorsque nous entendons une série de syllabes – comme bagabagaba – nous percevons spontanément une répétition du mot « baga » ou « gaba ». Des mots semblent se former, même si, d’un point de vue phonétique, il s’agit d’une séquence non structurée de sons. Pour ce qui est des séquences sonores, dans lesquelles nous ne pouvons reconnaître des mots, nous percevons ces effets comme des rythmes iambiques ou trochaïques réguliers.

Vous pouvez faire quelques expériences et même participer aux études de la .

La suite?

Si les effets observés dans le cadre de cette étude sont universels et s’appliquent à toutes les langues, une nouvelle porte d’exploration s’ouvrira sur la façon dont les nouveau-nés arrivent à analyser un signal lorsqu’ils entrent en contact avec le langage pour la première fois. Les retombées seraient également intéressantes pour les technologies de synthèse et de reconnaissance de la parole. Toutefois, d’après des études interlinguistiques sur la loi iambo-trochaïque, les langues présenteraient des différences importantes en matière de rythme.

Mon équipe a commencé à se pencher sur les différences réelles entre les langues qui persistent une fois que les deux dimensions de groupement et de proéminence ont été séparées, comme nous l’avons fait pour l’anglais dans notre étude. Les résultats préliminaires indiquent qu’une fois ces dimensions démêlées, on remarque une certaine constance entre les langues.

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L’article « Two-dimensional parsing of the acoustic stream explains the iambic-trochaic law », par Michael Wagner, a été publié dans .

DOI :


L’Université McGill

Fondée en 1821 à Montréal, au Québec, l’Université McGill figure au premier rang des universités canadiennes offrant des programmes de médecine et de doctorat. Année après année, elle se classe parmi les meilleures universités au Canada et dans le monde. Établissement d’enseignement supérieur renommé partout dans le monde, l’Université McGill exerce ses activités de recherche dans deux campus, 11 facultés et 13 écoles professionnelles; elle compte 300 programmes d’études et au-delà de 40 000 étudiants, dont plus de 10 200 aux cycles supérieurs. Elle accueille des étudiants originaires de plus de 150 pays, ses 12 800 étudiants internationaux représentant 31 % de sa population étudiante. Au-delà de la moitié des étudiants de l’Université McGill ont une langue maternelle autre que l’anglais, et environ 19 % sont francophones.

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