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Nouvelles

L’effet paternel

Découverte sur la façon dont la mémoire génétique de l’environnement pourrait se transmettre d’un homme à ses petits-enfants
A father's behavior and environment before his children are even conceived may affect the health of his children and grandchildren

±ĘłÜ˛ú±ôľ±Ă©: 8 October 2015

Si vous avez du diabète, un cancer ou même des problèmes cardiaques, c’est peut-être un peu à cause du comportement ou de l’environnement de votre père, voire de votre grand-père. En effet, des chercheurs ont démontré ces dernières années qu’avant même la conception de sa progéniture, la vie d’un père (son alimentation, sa consommation de drogues, son exposition à des produits toxiques et même son stress) peut influencer le développement et la santé non seulement de ses enfants, mais également de ses petits-enfants.

Cependant, malgré une décennie de travaux dans ce domaine, les chercheurs n’avaient toujours pas une compréhension approfondie du mécanisme de transmission de la mémoire génétique de l’environnement sur plusieurs générations. Des chercheurs de McGill et leurs collaborateurs suisses pensent avoir trouvé une pièce essentielle de ce casse-tête moléculaire. Ils ont découvert que les protéines appelées histones, peu étudiées jusqu’à présent, pourraient jouer un rôle crucial dans le processus.

Ils croient que cette dĂ©couverte, qu’ils ont dĂ©crite dans un article tout juste publiĂ© dansĚýScience, a le potentiel de modifier en profondeur notre comprĂ©hension de la manière par laquelle l’hĂ©rĂ©ditĂ© se transmet. En effet, les chercheurs dĂ©montrent qu’une autre substance que l’ADN joue un rĂ´le important dans l’hĂ©rĂ©ditĂ© en gĂ©nĂ©ral, et qu’elle pourrait dĂ©terminer si les enfants et les petits-enfants d’un père seront en bonne santĂ© ou non.

Suivre une nouvelle voie

Auparavant, la plupart des recherches dans ce domaine, qu’on appelle l’épigénétique, se sont concentrées sur un processus qui fait appel à l’ADN et à certaines molécules (les groupes méthyles) qui se fixent à l’ADN et augmentent ou diminuent l’expression de gènes particuliers.

Les chercheurs se demandaient si les histones pourraient jouer un rôle dans la transmission de l’information héréditaire du père à sa progéniture parce qu’elles font partie de ce que le spermatozoïde transmet au moment de la fécondation. Les histones sont distinctes de notre ADN, même si elles interagissent avec lui pendant la formation cellulaire, en jouant le rôle d’une bobine autour de laquelle l’ADN s’enroule.

Pour tester leur théorie quant au rôle possible des histones pour guider le développement de l’embryon, les chercheurs ont créé des souris chez lesquelles ils ont légèrement altéré l’information biochimique sur les histones pendant la formation des spermatozoïdes et ils ont ensuite mesuré les résultats. C’est un peu comme s’ils avaient fait une petite marque sur une bobine de fil pour vérifier l’effet sur le fil qui s’enroule autour de la bobine. Après cela, les chercheurs ont étudié les effets sur les rejetons.



L’hérédité – au-delà de l’ADN

Les chercheurs ont dĂ©couvert des consĂ©quences graves pour les petitsĚý:Ěý des effets sur leur dĂ©veloppementĚý– certains avaient des anomalies congĂ©nitales et un dĂ©veloppement anormal du squeletteĚý– et des effets sur leur survie. Et le rĂ©sultat le plus surprenant Ă©tait que ces effets Ă©taient encore visibles deux gĂ©nĂ©rations plus tard.

«ĚýNous Ă©tions vraiment renversĂ©s en voyant la diminution du taux de survie d’une gĂ©nĂ©ration Ă  l’autre et les anomalies du dĂ©veloppement. Nous n’aurions jamais cru que la modification d’une caractĂ©ristique externe Ă  l’ADN, c’est‑à‑dire une protĂ©ine, pourrait intervenir dans l’hĂ©rĂ©ditĂ©Ěý», a dĂ©clarĂ© Sarah Kimmins, du DĂ©partement de sciences animales de l’UniversitĂ© McGill, qui fait partie des principaux auteurs de l’article. La Pre Kimmins est Ă©galement titulaire de la Chaire de recherche du Canada en Ă©pigĂ©nĂ©tique, reproduction et dĂ©veloppement.

«ĚýCes rĂ©sultats sont remarquables parce qu’ils indiquent que d’autres donnĂ©es que celles fournies par l’ADN sont en cause dans l’hĂ©rĂ©ditĂ©, a ajoutĂ© la Pre Kimmins. L’étude souligne le rĂ´le crucial du père dans la santĂ© de ses enfants, voire de ses petits-enfants. Ces travaux ouvrent de nouvelles avenues de recherche pour la prĂ©vention et le traitement possibles de diverses maladies qui ont des rĂ©percussions sur la santĂ© des gĂ©nĂ©rations suivantes, Ă©tant donnĂ© que les modifications chimiques des histones sont sensibles aux expositions environnementales.Ěý»

Experts qui ont commentĂ© l’article ou qui sont disposĂ©s Ă  ĂŞtre interviewĂ©s Ă  son sujetĚý:

John%20McCarrey%20%3cJohn.McCarrey [at] utsa.edu%3e">John R. McCarrey, détenteur distingué de la Chaire de biologie cellulaire et moléculaire Robert et Helen Kleberg, Département de biologie, Université du Texas à San Antonio

bartolom [at] mail.med.upenn.edu (Pre Marisa Bartolomei), Département de biologie cellulaire et développementale, École de médecine Perelman de l’Université de Pennsylvanie

«ĚýBien que l’on dispose de donnĂ©es probantes substantielles quant Ă  la possibilitĂ© d’une transmission paternelle de maladies et de phĂ©notypes indĂ©sirables Ă  l’enfant en l’absence de mutations gĂ©nĂ©tiques, il s’agit de la première Ă©tude Ă  dĂ©montrer vĂ©ritablement un mĂ©canisme rĂ©alisable par lequel cela peut se produire. L’étude donne confiance aux chercheurs pour approfondir la piste du maintien des histones dans les cellules germinales masculines en tant que mĂ©canisme de l’hĂ©rĂ©dité… et elle servira Ă©galement aux pères de rappel de la nĂ©cessitĂ© de protĂ©ger leurs cellules reproductrices avec diligence.Ěý»

Les travaux ont Ă©tĂ© financĂ©s par les Instituts de recherche en santĂ© du Canada, GĂ©nomeĚýQuĂ©bec, le RĂ©seau quĂ©bĂ©cois en reproduction, le Fonds de recherche du QuĂ©bec – Nature et technologies, le Fonds Boehringer Ingelheim, le Fonds national suisse de la recherche scientifique et la Fondation Novartis pour la recherche.

Ă€ lireĚý: l’article «ĚýDisruption of histone methylation in developing sperm impairs offspring health transgenerationallyĚý» de Keith Siklenka et autres collaborateurs paru dans Science.

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