La pandémie de COVID‑19 a exposé au grand jour une dure réalité : le déclin du secteur biopharmaceutique canadien, qui dure depuis plusieurs décennies, prive aujourd’hui le pays de la capacité de fabrication nécessaire pour produire rapidement des vaccins et des traitements vitaux.
En réponse à ce constat, le gouvernement fédéral a lancé une  visant à rebâtir le secteur de la biofabrication et à préparer le pays à d’autres urgences sanitaires. Au cœur de ce programme de 2,2 milliards de dollars, échelonné sur sept ans, figure notamment la formation des scientifiques, des ingénieur(e)s et des technicien(ne)s qui assureront le bon fonctionnement de nouvelles installations de pointe.
En vue de contribuer à ce bassin de talents, l’Université McGill a mis au point un programme de maîtrise en biofabrication. Lancé cet automne, ce programme offre aux étudiant(e)s une formation de haut niveau accompagnée d’une expérience pratique acquise lors de stages auprès de partenaires du secteur public et privé.
L’objectif du nouveau programme « est essentiellement de former les effectifs nécessaires à la croissance » du secteur, indique Amine Kamen, professeur de génie biologique à l’Université McGill et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en bioprocédés de production de vaccins antiviraux.
De nouveaux renforts
L’Université McGill a joué un  dans le développement de la technologie de l’ARN messager depuis la découverte de l’ARNm, en 1961. C’est l’utilisation de l’ARNm synthétique qui a permis la mise au point de vaccins contre la COVID‑19 à une vitesse sans précédent, et la technologie à l’ARN se révèle prometteuse dans le traitement d’autres maladies.
Néanmoins, pour encourager la production biopharmaceutique au pays, il faut d’abord pouvoir produire des biomatériaux en grandes quantités. C’est ici qu’entre en scène le nouveau programme de maîtrise, grâce auquel sera formé le personnel hautement qualifié, nécessaire au bon fonctionnement de grandes installations de production, ainsi que les technicien(ne)s qui y travailleront.
Cette année, le programme a été lancé avec une cohorte qui ne compte que dix étudiant(e)s. Mais déjà , l’automne prochain, le programme en accueillera 30 et, à terme, 50. Échelonnée sur 18 mois, la maîtrise comporte une année universitaire d’enseignement en classe suivie de deux stages.
Tahsin Abedi fait partie de cette toute première cohorte. Originaire du Bangladesh, elle a obtenu un baccalauréat en génie biomédical de l’Université McGill en mai dernier. « J’hésitais à entreprendre une formation aux cycles supérieurs tout de suite après mon baccalauréat, mais dans notre domaine, il faut avoir de l’expérience ou des connaissances plus approfondies. » Et le nouveau programme de maîtrise « nous permet d’acquérir cette formation plus poussée. »
Pleins feux sur l’innovation
Parmi les employeurs qui ont accepté d’offrir des stages figure Moderna, l’entreprise de Cambridge (au Massachusetts) connue pour avoir mis au point l’un des premiers vaccins contre la COVID‑19, aussi l’un des plus efficaces.
Plus tĂ´t cette annĂ©e, McGill a Ă©tĂ© la première universitĂ© canadienne Ă adhĂ©rer au programme mĎ㽶ĘÓƵ Access de Moderna. L’objet de ce programme : accĂ©lĂ©rer l’innovation, par la recherche concertĂ©e et les Ă©tudes prĂ©cliniques, en vue de la dĂ©couverte de vaccins et de mĂ©dicaments contre les maladies infectieuses Ă©mergentes et nĂ©gligĂ©es.
Moderna a récemment  de sa nouvelle installation de pointe à Laval, au nord de Montréal, où elle mettra au point des vaccins à ARNm.
Les programmes qui accordent une place importante aux stages, comme cette nouvelle maîtrise en biofabrication, « peuvent attirer des talents d’ici et de partout dans le monde, qui viendront prendre leur place et réaliser leur potentiel dans le secteur mondial de fabrication de produits à ARNm », souligne Nedim Emil Altaras, vice-président principal du développement technique de Moderna.
Un profil attrayant
Le Conseil national de recherches Canada est un autre partenaire clé du nouveau programme de McGill. L’organisme fédéral de recherche-développement a fait construire son nouveau Centre de production de produits biologiques à Montréal, où seront produites environ 24 millions de doses de vaccin chaque année.
Parmi les autres sociétés qui se sont engagées à soutenir le programme de maîtrise en biofabrication, mentionnons les fabricants de vaccins Medicago et GlaxoSmithKline à Québec, Sanofi Pasteur à Toronto, ainsi que plusieurs entreprises de biotechnologie de plus petite envergure, aux quatre coins du pays.
« Le programme (de McGill) était plus intéressant que les autres à mes yeux puisqu’il offrait des stages en fin de parcours », explique Azmi Ezzat Agha, qui a obtenu un baccalauréat en biochimie et biologie cellulaire de l’Université Western Ontario, le printemps dernier. « Je voulais élargir mes horizons, continuer d’apprendre et acquérir de l’expérience, et ce programme était tout indiqué pour ça. »
Une expérience précieuse
Pour les étudiants et étudiantes, les stages sont une excellente occasion d’appliquer les nouvelles connaissances à des situations concrètes et de perfectionner les compétences comportementales, si importantes à la vie professionnelle.
« Je crois que ça va beaucoup m’aider à améliorer mes compétences en communication », dit Rim Al‑Siss, qui s’est jointe au programme après avoir obtenu un baccalauréat en génie chimique et en biochimie de l’Université d’Ottawa. « Je pourrai voir et comprendre ce qui se passe dans le domaine et quelles sont les interactions entre les différents joueurs du secteur. »
La maîtrise en biofabrication est offerte dans le cadre du programme de génie biologique et biomédical de l’Université McGill, programme interfacultaire d’études supérieures qui regroupe le Département de génie biologique de la Faculté de génie et le Département de génie biomédical de la Faculté de médecine et des sciences de la santé.