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Questions et réponses sur la COVID-19 : sécurité au supermarché, avec Jennifer Ronholm

Jennifer Ronholm, professeure adjointe au Département des sciences animales et au Département des sciences de l’alimentation et de la chimie agricole, nous parle de sécurité au super marché et offre quelques conseils pratiques afin de se protéger du SARS-CoV-2 lorsque vous faites vos courses. Dans le cadre de ses recherches, elle utilise des techniques de séquençage de prochaine génération pour étudier l’effet du microbiome des animaux destinés à la consommation sur la qualité des aliments ainsi que l’effet du microbiome des aliments sur la santé humaine.

Comment les aliments peuvent-ils être contaminés au supermarché? Est-ce qu’il y a des aliments plus risqués que d’autres sur ce plan?

Le risque qu’un aliment soit contaminé au supermarché est faible, voire très faible, et celui de contracter la COVID-19 en consommant des aliments achetés au supermarché est très, très faible.

Le coronavirus est un virus dit « enveloppé », c’est-à-dire entouré d’une membrane de phospholipides, de protéines et de glycoprotéines. Cette membrane est indispensable : pour que le virus infecte l’hôte, elle doit être essentiellement intacte. Cette enveloppe virale étant toutefois très sensible à la sécheresse, à la chaleur, aux enzymes, aux variations du pH et aux détergents, les virus enveloppés succombent aux éléments assez rapidement; ils se distinguent en cela des virus non enveloppés, comme les norovirus, qui se propagent facilement par voie alimentaire.

Les auteurs d’une étude publiée dans la revue The New England Journal of Medicine indiquent que le coronavirus peut demeurer décelable pendant 72 heures sur une surface (acier inoxydable, plastique et carton). Cependant, le nombre de particules virales infectieuses (élément déterminant du potentiel pathologique) diminue rapidement. Ainsi, après une heure environ, la moitié seulement des particules virales sont encore infectieuses, et la population viable continue de décroître de moitié toutes les demi-heures. Après 24 heures seulement, le carton était exempt de particules infectieuses. En raison de ce déclin rapide de la viabilité virale, vous risquez moins d’être contaminé par contact avec une surface.

Jusqu’à maintenant, rien n’indique que l’on peut attraper la COVID-19 en consommant des aliments contaminés. La possibilité de transmission de la COVID-19 par la consommation ou la manipulation de fruits et de légumes crus que des clients auraient pu toucher au supermarché inquiète grandement, mais elle n’est étayée par aucune donnée probante.

En gros, quelle est la conduite à tenir au supermarché?

D’abord, vous ne devez aller au supermarché sous aucun prétexte si vous rentrez d’un voyage à l’étranger, si on vous a dit de vous isoler ou si vous avez un symptôme de la COVID-19.

Si vous n’êtes pas immunodéprimé et avez moins de 60 ans, n’allez pas au supermarché pendant l’heure suivant l’ouverture : le magasin vient d’être nettoyé, et cette plage horaire est réservée à la population vulnérable.

Tenez-vous toujours à deux mètres de distance des autres clients et des employés.

Ne vous attardez pas! Ce ne sont pas les aliments qui risquent de vous transmettre la COVID-19 au supermarché, mais bien les autres clients : moins vous passez de temps dans le magasin, moins vous risquez de l’attraper. Au besoin, faites-vous une liste et suivez-la à la lettre; ne flânez pas devant les étalages.

Utilisez le paiement sans contact afin de ne pas manipuler d’argent et de ne pas avoir à saisir votre numéro d’identification personnelle.

Désinfectez-vous les mains avant d’entrer dans le supermarché et nettoyez la poignée du chariot à l’aide d’un antiseptique à base d’alcool, puis lavez-vous de nouveau les mains avant d’entrer dans votre véhicule.

N’envoyez qu’un seul membre de la famille au supermarché. Ce n’est pas le temps de faire les courses en famille, et c’est d’ailleurs quelque chose qui m’exaspère au plus haut point actuellement. Cette pratique fait augmenter de façon exponentielle le risque d’infection et de propagation.

Dois-je porter un masque et des gants?

Un masque, oui. Des gants, non.

On sait maintenant que le port du masque diminue le risque d’infection et de propagation de la maladie; il pourrait donc devenir un élément important de la stratégie à long terme de lutte contre la COVID-19.

Pour les gants, par contre, c’est une autre paire de manches.

Dans un laboratoire de biosécurité de niveau 2, nous portons des gants tout en nous comportant comme si nous travaillions à mains nues : il y va de notre sécurité. Par exemple, nous nous lavons les mains en entrant dans le laboratoire et nous travaillons avec des gants, que nous changeons régulièrement. Si nous les souillons en renversant quelque chose ou si nous passons d’une zone à une autre du laboratoire, nous changeons de gants. Nous avons des surfaces « propres » que nous touchons soit à mains nues, soit avec une nouvelle paire de gants. Avant de sortir du laboratoire, nous nous lavons les mains à fond, comme si nous n’avions pas porté de gants.

En adoptant ces pratiques, nous évitons de contaminer les diverses zones du laboratoire. Et avant de sortir du laboratoire, il est important de retirer nos gants pour ensuite nous laver les mains, parce que nous évitons ainsi de transporter des germes infectieux dans d’autres zones de notre immeuble.

Le port des gants n’est qu’une stratégie de prévention des infections parmi d’autres; pour être efficace, elle doit être associée à d’autres stratégies, notamment une bonne formation, le lavage des mains et le respect d’une procédure normalisée.

Or, la personne qui porte des gants au supermarché ne les utilise pas correctement; d’ailleurs, pour être franche, je dois dire que ce n’est pas évident de faire bon usage des gants dans un cadre comme celui-là. Les gants procurent un faux sentiment de sécurité qui, fort probablement, favorise la propagation du virus sur les diverses surfaces du magasin. Le lavage des mains à l’eau savonneuse – ou à l’aide d’un désinfectant à base d’alcool – à l’entrée, puis à la sortie, du supermarché est une stratégie BEAUCOUP plus efficace.

Puis-je apporter mes sacs réutilisables, ou devrais-je plutôt utiliser des sacs jetables en papier ou en plastique?

Ça, c’est une question qui me turlupine. Je ne vous apprends rien en vous disant qu’il y a sur Terre un problème de sacs en plastique qu’il faut régler. D’un autre côté, si on permet aux gens d’apporter leurs sacs, on doit être bien certain qu’ils les ont lavés avant de faire leurs emplettes, sinon on risque d’introduire des vecteurs dans des lieux hautement fréquentés. La probabilité qu’un sac réutilisable soit à l’origine de la propagation du virus est extrêmement faible, mais je peux comprendre que les supermarchés soient réticents à l’heure actuelle. Selon moi, l’emploi de sacs réutilisables est relativement sûr sur le plan microbiologique; toutefois, vu l’anxiété qu’ils provoquent chez les caissiers et caissières, les considérations environnementales devraient peut-être passer au second plan pour l’instant. Mais après la pandémie, nous devrons tous ressortir nos sacs réutilisables.

Devrais-je payer comptant ou utiliser ma carte de crédit? Les caisses libre-service sont-elles plus sûres?

S’il y a des caisses libre-service, utilisez-les. Il y aura ainsi moins d’employés aux caisses, et donc moins d’employés dans le magasin.

Payez par carte de crédit. Si vous pouvez utiliser le paiement sans contact, faites-le pour ne pas avoir à toucher le clavier.

Les règles mises en place dans la plupart des supermarchés sont-elles suffisantes pour éviter la contamination des aliments?

Je pense que oui.

Les aliments ne sont pas un vecteur efficace de ce virus. Même si, en théorie, ils peuvent propager le virus – et je ne suis pas convaincue que ce soit le cas – on n’a pas fait état d’un grand nombre d’infections transmises par voie alimentaire. Le plus grand danger dans le supermarché vient des autres clients; c’est pourquoi la distance de deux mètres est si importante.

Il y a une seule chose que j’améliorerais pour prévenir les infections au supermarché. Même en suivant le sens des flèches sur le plancher, je ne peux pas me tenir à deux mètres de l’employé en train de regarnir les tablettes dans une allée. Si les magasins fermaient quelques heures par jour pour permettre au personnel de faire ce travail, les employés seraient mieux protégés. Mais bon, peut-être n’est-ce pas possible ni même nécessaire.

Y a-t-il un risque de contamination lorsqu’on commande un repas ou que l’on fait livrer son épicerie?

Non, pas si vous restez à bonne distance du livreur. Et la probabilité de contracter le virus dans les aliments eux-mêmes est minime.

Est-ce plus sûr de faire livrer l’épicerie, même si on n’élimine pas ainsi totalement l’intervention humaine?

Si vous êtes atteint d’une maladie sous-jacente, c’est probablement la façon la plus sûre de faire vos courses. Cela dit, si vous vous lavez les mains à l’entrée, puis à la sortie du supermarché, et restez à deux mètres des autres personnes dans le magasin, ce type de sortie est relativement sûr.

Dois-je nettoyer la surface des articles et des victuailles livrés? Quel produit nettoyant dois-je utiliser?

Non. Ce n’est pas nécessaire.

Le virus peut se transmettre par contact avec une surface, mais en réalité, la probabilité d’être infecté par cette voie est très faible.

Comment dois-je nettoyer les fruits et les légumes?

On doit les laver sous le robinet, à l’eau tiède. Ne lavez pas vos fruits et légumes au savon, parce que le savon contient des produits chimiques qui pourraient vous rendre malade en cas d’ingestion.

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