La transformation de protéines de coronavirus en nanoparticules pourrait permettre de créer un vaccin efficace contre la COVID-19
En modifiant la structure d’une protéine précise, il pourrait être possible de neutraliser le virus
Des chercheurs de l’Université McGill font partie d’une équipe internationale dirigée par l’Université de Buffalo ayant découvert une technique qui pourrait permettre d’augmenter l’efficacité des vaccins contre le SRAS-CoV-2, le virus responsable de la COVID-19. L’étude du groupe a récemment été publiée en ligne, dans la revue scientifique .
Depuis le début de 2020, la COVID-19 a infecté au moins 40 millions de personnes et causé plus d’un million de décès dans le monde, causant une pandémie qui ébranle la planète pendant que des équipes de recherche biomédicale cherchent sans relâche un vaccin efficace. Des chercheurs avancent maintenant que la conception de vaccins qui imitent partiellement la structure du virus pourrait fonctionner.
« Cet article représente un pas en avant, car il ouvre une nouvelle voie vers l’élaboration d’un vaccin contre la COVID-19 », affirme Joaquin Ortega, professeur au Département d’anatomie et biologie cellulaire de l’Université McGill et coauteur de l’étude. « Nous avons découvert qu’en présentant l’un des antigènes les plus importants du SRAS-CoV-2 – le domaine de liaison au récepteur (receptor-binding domain, ou RBD) – lorsqu’il est fixé à la surface de liposomes (des nanodispositifs largement utilisés pour l’administration de médicaments contre le cancer), la réponse anticorps induite est beaucoup plus forte que lorsque le RBD est administré seul. » Les chercheurs font état de la création d’une plateforme flexible pour l’élaboration d’un vaccin contre la COVID-19 – une nouvelle méthode qui est efficace lorsque l’antigène RBD est adsorbé sur la surface du liposome, mais qui peut s’appliquer aussi à d’autres antigènes. « Nous ne savons toujours pas quels sont les antigènes du virus qui engendrent l’immunité la plus robuste et qui, par conséquent, seraient les plus utiles pour élaborer un vaccin », souligne Mike Strauss, professeur adjoint au Département d’anatomie et biologie cellulaire de McGill et coauteur de l’article. « De plus, certains antigènes peuvent causer des effets indésirables, notamment des lésions aux tissus pulmonaires, un problème important qu’ont rencontré les chercheurs qui tentaient d’élaborer des vaccins contre le SRAS-CoV-1 dans les années 2000. En ayant une plateforme flexible comme celle décrite dans notre article, nous pouvons créer des vaccins “à la carte” qui ne contiennent que les antigènes qui déclenchent une réponse immunitaire bénéfique, tout en excluant ceux qui provoquent des effets indésirables. »
Les microscopes de pointe de McGill utilisés pour créer la plateforme vaccinale
McGill a contribué à la création de cette plateforme d’élaboration de vaccins en effectuant la caractérisation structurelle des nanoparticules utilisées pour transporter l’antigène et l’exposer au système immunitaire, grâce à l’Installation de recherche en microscopie électronique (FEMR) de McGill, l’installation de cryomicroscopie électronique la plus vaste et la plus polyvalente au Canada. On y trouve les microscopes électroniques les plus perfectionnés et les plus rapides du monde, qui produisent des images d’une résolution extrêmement élevée – indispensables à la caractérisation de nanoparticules comme celles utilisées comme porteurs d’antigènes dans ces vaccins. L’utilisation d’images obtenues par cryomicroscopie électronique est la méthode par excellence permettant de s’assurer que les liposomes qui portent les antigènes du vaccin ont la taille et la structure voulues pour induire une bonne réponse immunitaire.
Les professeurs Strauss et Ortega, qui sont respectivement directeur technique et directeur scientifique de la FEMR, ont transféré environ trois microlitres de préparation vaccinale dans leur microscope Titan Krios. Après environ une heure, le microscope Krios avait produit plus de 300 images des petites vésicules lipidiques contenues dans le vaccin. Ces images ont permis de confirmer que l’antigène RBD s’adsorbait bien sur la surface des liposomes, l’emplacement optimal pour la présentation de l’antigène au système immunitaire.
« Les images de cryomicroscopie électronique obtenues à la FEMR, qui montrent la structure et l’emplacement de l’antigène RBD sur la surface des vésicules lipidiques, ont fourni des données essentielles à l’élaboration de ce vaccin contre le SRAS-CoV-2, explique le Pr Ortega. Aucune autre méthode ne permet de visualiser directement l’antigène adsorbé à la surface du liposome. Il existe d’autres méthodes biophysiques qui donnent une mesure indirecte suggérant que les antigènes ont peut-être été adsorbés, mais seulement la cryomicroscopie électronique nous permet de visualiser directement ces antigènes à la surface des liposomes. »
Bien que l’article démontre que ce vaccin contre le SRAS-CoV-2 induit une réponse immunitaire robuste dans des modèles murins, les chercheurs précisent que comme tout autre vaccin, il doit encore faire l’objet de tests et d’essais cliniques rigoureux avant de pouvoir être administré aux humains. Ils ajoutent que les éléments probants présentés dans cette étude qui démontrent qu’il est avantageux de présenter l’antigène RBD sous forme particulaire pourraient servir à la conception d’un éventuel vaccin ciblant précisément cet antigène.
Parmi les auteurs de l’étude : Jonathan Lovell, Wei-Chiao Huang, Shiqi Zhou, Xuedan Heet Moustafa T. Mabrouk, du département de génie biomédical de l’Université de Buffalo; Kevin Chiemet Luis Martinez-Sobrido, de l’Institut de recherche biomédicale du Texas; Ruth H. Nissly, Ian M. Bird et Suresh V. Kuchipudi,du Laboratoire de diagnostic animal du département de sciences vétérinaires et biomédicales de l’Université Pennsylvania State; Mike Strausset Joaquin Ortega, du Département d’anatomie et biologie cellulaire de l’Université McGill; Suryaprakash Sambhara,de la division d’immunologie et de pathogenèse des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) des États-Unis; Elizabeth A. Wohlfert,du département de microbiologie et d’immunologie de l’Université de Buffalo; Bruce A. Davidson, du département d’anesthésiologie et du département de pathologie et de sciences anatomiques de l’Université de Buffalo.
Cette étude a reçu du soutien des National Institutes of Health des États-Unis, de l’Initiative interdisciplinaire en infection et immunité de McGill (MI4) et de l’Installation de recherche en microscopie électronique (FEMR) de l’Université McGill. La FEMR est soutenue par la Fondation canadienne pour l’innovation, le gouvernement du Québec et l’Université McGill.