Une étude montréalaise inédite explore le lien entre le cancer du sein et la pollution atmosphérique
La pollution de l’air a déjà été associée à de multiples
problèmes de santé. Une nouvelle étude d’avant-garde suggère que la
pollution associée à la circulation routière pourrait augmenter
chez les femmes le risque de souffrir d’une autre maladie mortelle.
Publiée dans la prestigieuse revue Environmental Health
Perspectives, l’étude, menée par des chercheurs de l’Institut de
recherche du CUSM (IR du CUSM, Dr Mark Goldberg), de l’Université
McGill (Drs Goldberg, Dan Crouse et Nancy Ross) et de l’Université
de Montréal (Dre France Labrèche), établit un lien entre le risque
de cancer du sein – la deuxième principale cause de décès lié au
cancer chez la femme – et la pollution atmosphérique provenant des
véhicules à moteur.
« Nous constatons, depuis quelque temps, que les taux de cancer du
sein augmentent », affirme le Dr Mark Goldberg, coauteur de l’étude
et chercheur à l’IR du CUSM. « Personne ne sait véritablement
pourquoi et seulement un tiers des cas sont associés à des facteurs
de risque connus. Puisque personne n‘avait encore étudié le lien
entre la pollution atmosphérique et le cancer du sein en utilisant
des cartes détaillées de la pollution de l’air, nous avons décidé
de nous pencher sur la question. »
Le Dr Goldberg et ses collègues ont abordé le problème en combinant
des données de diverses études. Ils ont tout d’abord utilisé les
résultats de leur étude menée en 2005 2006 afin de créer deux «
cartes » de la pollution atmosphérique illustrant les niveaux de
dioxyde d’azote (NO2), un sous-produit de la circulation
automobile, dans diverses parties de la ville en 1996 et 10 ans
plus tôt, en 1986.
Ils ont ensuite ajouté à ces cartes de la pollution atmosphérique
l’emplacement du domicile des femmes ayant reçu un diagnostic de
cancer du sein et ayant participé à une étude menée en 1996 1997.
Leurs résultats ont été surprenants : l’incidence de cancer du sein
était nettement supérieure dans les zones où la pollution
atmosphérique était plus élevée.
« Nous avons découvert un lien entre le cancer du sein après la
ménopause et l’exposition au dioxyde d’azote (NO2), qui est un «
marqueur » de la pollution de l’air liée à la circulation routière
», livre le Dr Mark Goldberg. « Sur l’île de Montréal, les niveaux
de NO2 étaient compris entre 5 ppb et plus de 30 ppb. Nous avons
constaté que le risque augmentait d’environ 25 % par tranche de
cinq parties par milliard (ppb) de NO2. Cela signifie, en d’autres
termes, que les femmes vivant dans les zones où la pollution de
l’air était la plus élevée étaient près de deux fois plus
susceptibles d’être atteintes d’un cancer du sein que celles qui
vivaient dans les zones les moins polluées. »
Selon le Dr Goldberg, ces résultats inquiétants doivent être
interprétés avec énormément de précaution. « En premier lieu, cela
ne signifie pas que le NO2 cause le cancer du sein », explique
t-il. « Ce gaz n’est pas le seul polluant que génèrent les
automobiles et les camions. Cependant, le NO2 est associé Ã
d’autres gaz, particules et composés reliés à la circulation
automobile dont certains sont connus comme étant cancérigènes. Le
dioxyde d’azote n’est qu’un marqueur et non l’agent cancérigène en
tant que tel. »
Une telle étude n’est pas à l’abri d’erreurs inconnues. Bien que
les chercheurs aient tenté de tenir compte le plus possible de
celles-ci, certaines incertitudes persistent. « Par exemple, nous
ne savons pas dans quelle mesure les femmes qui ont participé Ã
l’étude ont été exposées à la pollution à leur domicile ou au
travail; dépendant de la nature de leurs activités quotidiennes, du
temps consacré à l’extérieur et ainsi de suite », souligne le
Dr Goldberg.
« Des études publiées aux États-Unis ont également démontré des
liens possibles entre le cancer et la pollution atmosphérique »,
ajoute la Dre France Labrèche. « Pour le moment, nous ne sommes pas
en mesure d’affirmer que la pollution atmosphérique conduit au
développement du cancer du sein. Cependant, nous pouvons affirmer
que ce lien éventuel mérite d’être examiné attentivement. Sur le
plan de la santé publique, ce lien potentiel plaide également en
faveur des mesures visant à réduire la pollution atmosphérique liée
à la circulation routière dans les zones résidentielles. »