Scolarité de la mère et dépression chez l’enfant
Une nouvelle étude réalisée par des chercheurs de l’Université McGill indique que les enfants dont la mère n’a pas terminé son cours secondaire courent un risque deux fois plus élevé de souffrir d’un épisode dépressif majeur au début de l’âge adulte que ceux dont la mère a terminé avec succès ses études secondaires.
« Les rĂ©sultats que nous avons obtenus indiquent que l’absence d’études secondaires chez la mère influe considĂ©rablement sur le risque d’épisode dĂ©pressif majeur chez ses enfants au dĂ©but de l’âge adulte », affirme AmĂ©lie Quesnel-VallĂ©e, auteure principale de l’étude. Selon les chercheurs, cette augmentation du risque de dĂ©pression ne peut ĂŞtre attribuable Ă des antĂ©cĂ©dents parentaux de dĂ©pression, Ă l’adversitĂ© en dĂ©but de vie, au niveau de scolaritĂ© de l’enfant, ni au revenu de ce dernier au dĂ©but de l’âge adulte. Â
Cette Ă©tude est la première au Canada Ă Ă©tablir la distinction entre l’effet exercĂ© par le niveau de scolaritĂ© de la mère et celui du père sur l’augmentation du risque de dĂ©pression au dĂ©but de l’âge adulte. Elle porte sur une cohorte de 1 267 personnes ayant participĂ© Ă l’EnquĂŞte nationale sur la santĂ© de la population. Les participants ont d’abord Ă©tĂ© interrogĂ©s en 1994, lorsqu’ils Ă©taient âgĂ©s de 12 Ă 24 ans et habitaient avec leurs parents. Ils ont ensuite fait l’objet d’un suivi pendant 12 ans, après quoi les chercheurs ont Ă©valuĂ© le risque d’épisode dĂ©pressif majeur auquel ils Ă©taient exposĂ©s entre 22 et 36 ans. Â
« La dépression au début de l’âge adulte survient à un moment critique, lorsque la personne qui en souffre est encore aux études ou en formation, elle amorce sa carrière ou fonde une famille. Les perturbations causées par cette maladie peuvent parfois entraîner une interruption du fil de ces événements de la vie qui risque d’avoir des répercussions permanentes », précise la professeure Quesnel-Vallée.
Fait intéressant, les données recueillies ont permis de conclure que le niveau de scolarité du père n’avait aucune incidence sur le risque de dépression. « Ces résultats, ainsi que les conclusions selon lesquelles l’effet exercé par le niveau de scolarité de la mère ne pouvait s’expliquer par la scolarité de l’enfant ni son revenu, semblent indiquer que les compétences parentales de la mère pourraient être en cause », affirme l’auteure principale de l’étude.
« L’éducation permet d’acquérir des compétences pratiques ‒ notamment dans les domaines de la communication, de l’analyse et de la résolution de problèmes ‒ et procure le sentiment d’avoir une plus grande emprise sur sa vie », affirme Alison Park, chercheuse à l’Institut national de santé publique du Québec, qui a contribué à cette étude dans le cadre de son programme de maîtrise, sous la supervision de la professeure Quesnel-Vallée. « Il se peut qu’une mère mieux instruite compose plus facilement avec les difficultés associées à l’éducation d’un enfant. Cette confiance accrue et ce sentiment de maîtrise peuvent aussi servir de modèle à ses enfants. »
L’article des chercheurs mcgillois, intitulé Life course socioeconomic position and major depression in Canada, a été publié dans la revue scientifique Social Psychiatry and Psychiatric Epidemiology ().
Cette étude est financée par une bourse du Fonds de recherche en santé du Québec, les Instituts de recherche en santé du Canada et le programme de subventions de contrepartie du Centre interuniversitaire québécois de statistiques sociales.