Les lacs du monde : Ă©tat des lieux
Le rivage total des lacs de la planète dĂ©passe plus de quatre fois la longueur du littoral marin mondial. Et si les eaux lacustres Ă©taient dĂ©versĂ©es sur la masse terrestre, elles formeraient une Ă©tendue de 1,3ĚýmètreĚý– environ 4ĚýpiedsĚý– de profondeur.
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Ce n’est lĂ qu’un aperçu des statistiques vertigineuses tirĂ©es de la base de donnĂ©es la plus vaste Ă ce jour sur les lacs de la planète, compilĂ©e par des gĂ©ographes de l’UniversitĂ©ĚýMcGill. PubliĂ©e dansĚýNatureĚýCommunications, leur Ă©tude Ă©clairera les scientifiques sur le rĂ´le de premier plan que jouent les lacs dans les mĂ©canismes environnementaux complexes de la TerreĚý: cycle hydrologique et mĂ©tĂ©o ainsi que transport, distribution dans le milieu environnant ou entreposage des polluants et des nutriments.
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«ĚýLa planète change, et les lacs aussiĚý», constate BernhardĚýLehner, auteur en chef et professeur agrĂ©gĂ© au DĂ©partement de ˛µĂ©´Ç˛µ°ů˛ą±čłóľ±±đ de l’UniversitĂ©ĚýMcGill. «ĚýCertains lacs disparaissent par manque d’eau, tandis que d’autres se forment ou s’étendent lĂ oĂą les prĂ©cipitations sont plus abondantes. Il importe donc de dresser un Ă©tat des lieux pour comprendre les changements que subissent les lacs, surveiller l’évolution de la situation et Ă©valuer les rĂ©percussions environnementales Ă l’échelle de la planète.Ěý»Ěý
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Des lacunes Ă combler
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Bien que les lacs soient examinés sous toutes leurs coutures dans certaines régions du monde, on dénote des lacunes importantes dans les données à l’échelle mondiale. On peut mesurer directement la superficie ou le rivage d’un lac, par exemple à l’aide d’une carte ou d’images satellites. Toutefois, lorsque vient le moment d’évaluer la quantité d’eau emprisonnée sous la surface, les choses se corsent.
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On a longtemps cru que les lacs Ă©taient gĂ©nĂ©ralement plus profonds en rĂ©gion vallonneuse ou montagneuse qu’en pays plat. C’était toutefois une hypothèse intuitiveĚý: en effet, jusqu’à rĂ©cemment, il Ă©tait pour ainsi dire impossible d’établir clairement un lien entre les ondulations du relief et la profondeur d’un lac.
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Cependant, grâce aux avancĂ©es de la technologie satellite, nous pouvons aujourd’hui mesurer le relief avec prĂ©cision. Les chercheurs de McGill ont ainsi pu Ă©tudier la corrĂ©lation entre les dĂ©nivellations autour de divers lacs et les milliers de relevĂ©s existants leur indiquant sur la profondeur de ces lacs. Soit dit en passant, les lacs avaient effectivement tendance Ă ĂŞtre plus profonds en rĂ©gion vallonneuse. Puis, au moyen de modèles informatiques, ils ont procĂ©dĂ© Ă une extrapolation, appliquant ces calculs Ă tous les lacs non Ă©valuĂ©s de la Terre. Ă€ partir de ces rĂ©sultats, ils ont calculĂ© le volume d’eau contenu dans plus de 1,4Ěýmillion de lacs d’une superficie dĂ©passant 10Ěýhectares, soit environ 14Ěýterrains de soccer. La rĂ©ponseĚý: plus de 180Ěý000Ěýkilomètres cubes.
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Que se passe-t-il sous la surface?
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Les chercheurs ont Ă©galement Ă©valuĂ© le «Ěýtemps de sĂ©jourĚý» de l’eau dans chacun des lacs, c’est-Ă -dire le temps Ă©coulĂ© entre le moment oĂą l’eau se dĂ©verse dans le lac et celui oĂą elle s’en Ă©chappe. Le temps de sĂ©jour moyen est d’environ cinq ans pour l’ensemble des lacs, mais, dans de nombreux cas, il est beaucoup plus court. Et, Ă l’autre extrĂŞme, on dĂ©nombre plus de 3Ěý000Ěýlacs dans lesquels l’eau peut sĂ©journer pendant une centaine d’annĂ©es, voire davantage.
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Selon les estimations des chercheurs, il y aurait plus de sept millions de kilomètres de rivages lacustres sur Terre. Cette distance correspond Ă environ 10Ěýallers-retours entre la Terre et la lune. «ĚýLorsqu’on pense aux multiples interactions entre le lac et ses environs, Ă ce milieu qui, tout en servant d’habitat aux espèces aquatiques et amphibies, peut Ă©galement contribuer Ă la production de gaz Ă effet de serre, on mesure pleinement l’importance des lacs dans les Ă©cosystèmes de notre planèteĚý», fait observer MathisĚýMessager, auteur principal de l’étude, qui a travaillĂ© Ă ce projet Ă titre d’étudiant au premier cycle, dans le laboratoire du PrĚýLehner.Ěý
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L’hĂ©ritage glaciaire du CanadaĚýĚýĚý
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Des lacs se forment constamment sous l’effet de processus gĂ©ologiques et environnementaux naturels qui se dĂ©roulent sur de longues pĂ©riodes; aussi la distribution actuelle des lacs terrestres n’est-elle qu’un instantanĂ© d’un paysage dynamique. Les 10Ěýplus grands lacs du monde renferment environ 85Ěý% des eaux lacustres de la Terre. Les 15Ěý% restants sont rĂ©partis dans plus de 1,4Ěýmillion de lacs situĂ©s pour la plupart au Canada. En effet, 62Ěý% des lacs du monde sont sur le territoire canadien, qui compte près de 900Ěý000Ěýlacs d’une superficie supĂ©rieure Ă 10Ěýhectares. Ces lacs sont issus de l’érosion des glaciers, suivie de leur fonte Ă la fin de la dernière pĂ©riode glaciaire, il y a environ 10Ěý000Ěýans.
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L’équipe de McGill mettra sa base de données à la disposition des chercheurs du monde entier. Elle s’efforce d’ailleurs d’y apporter quelques améliorations, par exemple par l’ajout de données sur les bassins hydrographiques qui alimentent les lacs.
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«ĚýOn entend souvent dire qu’on connaĂ®t mieux la surface de la lune ou de la planète Mars que le plancher des ocĂ©ansĚý», souligne le PrĚýLehner. «ĚýOn pourrait en dire autant du fond des lacs. Bien que, dans un sens, les lacs soient plus faciles Ă Ă©tudier que les vastes Ă©tendues ocĂ©aniques, il reste qu’on en sait fort peu sur ce qui se dĂ©roule dans les eaux lacustres de la Terre.Ěý»
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Cette étude a été financée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.
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L’article «ĚýEstimating the volume and age of water stored in global lakes using a geostatistical approachĚý», par MathisĚýLoĂŻcĚýMessager, BernhardĚýLehner, GĂĽntherĚýGrill, IrenaĚýNedeva et OliverĚýSchmitt, a Ă©tĂ© publiĂ© en ligne dansĚýNatureĚýCommunications, le 15 dĂ©cembre 2016.Ěý DOI: 10.1038/NCOMMS13603