Asthme et allergies: des dizaines de gènes altérés
Des chercheurs du Canada, du Royaume-Uni, de Suède et des États-Unis ont découvert plus de 30 gènes qui ont une incidence majeure sur un anticorps causant l’asthme et des allergies. Selon l’étude menée par l’équipe de recherche internationale parue en ligne dans le numéro de 18 février de la revue spécialisée Nature, certains de ces gènes pourraient fournir des cibles pour des médicaments destinés à traiter ces maladies.
En Europe et en AmĂ©rique du Nord, 30 pour cent de la population souffrent d’allergies, et 10 pour cent des enfants sont asthmatiques. L’immunoglobuline E (IgE) est l’anticorps qui dĂ©clenche les rĂ©actions allergiques au sein de ces groupes. Â
Les chercheurs, dont quatre sont rattachés à l’Université McGill, ont découvert que les gènes sont concentrés en éosinophiles, des globules blancs qui provoquent l’inflammation des voies respiratoires chez les sujets asthmatiques. Les gènes indiquent le moment où les éosinophiles sont activés et modulés de sorte de causer les conséquences les plus marquées.
Si des traitements visant à neutraliser les éosinophiles existent, ils sont néanmoins très coûteux et uniquement efficaces lorsqu’administrés chez des personnes asthmatiques. Ainsi, les signaux d’activation découverts ouvrent la voie à de nouveaux moyens d’orienter les traitements en prédisant les sujets susceptibles d’y répondre, et ce, avant même que le médicament ne soit administré.
Pour dĂ©couvrir ces gènes, l’équipe de recherche a fait appel Ă une technique novatrice : l’étude d’association Ă grande Ă©chelle de marques Ă©±čľ±˛µĂ©˛ÔĂ©łŮľ±±çłÜ±đs (epigenome-wide association study). Bien qu’ils ne modifient pas la sĂ©quence sous-jacente du code gĂ©nĂ©tique, les changements Ă©±čľ±˛µĂ©˛ÔĂ©łŮľ±±çłÜ±đs Ă l’ADN peuvent nĂ©anmoins ĂŞtre transmis au moment de la division cellulaire. Ils programment les cellules pour former des catĂ©gories et des tissus spĂ©cialisĂ©s.
« L’étude du génome humain se penche désormais sur la façon dont les modifications chimiques de l’ADN, notamment influencées par l’environnement, peuvent entraîner des conséquences marquées sur la santé humaine », a indiqué Mark Lathrop, directeur scientifique du Centre d’innovation Génome Québec et Université McGill et l’un des cochefs de l’étude. « Dans le cadre de nos travaux, nous avons démontré que certaines modifications épigénomiques jouent un rôle dans le déclenchement d’affections atopiques telles que les allergies et l’asthme. Ces nouvelles connaissances tracent la voie vers l’investigation du potentiel thérapeutique de plusieurs cibles novatrices. »
Les changements Ă©±čľ±˛µĂ©˛ÔĂ©łŮľ±±çłÜ±đs sont le plus facilement repĂ©rĂ©s par l’observation de modifications aux molĂ©cules mĂ©thyliques jointes au cĂ´tĂ© du brin d’ADN. Les chercheurs ont donc concentrĂ© leurs travaux sur les points nĂ©vralgiques de mĂ©thylation, notamment appelĂ©s îles CpG, positionnĂ©es Ă proximitĂ© de plusieurs gènes. Ils ont vĂ©rifiĂ© si les taux de mĂ©thylation de ces Ă®les, dans les leucocytes d’individus souffrant ou non d’asthme, Ă©taient corrĂ©lĂ©s au taux sanguin d’IgE. Ils sont parvenus Ă Ă©tablir de solides liens entre l’IgE et la mĂ©thylation d’îles CpG Ă 36 sites, dans 34 gènes. Chez les sujets asthmatiques, ces gènes produisent un taux accru d’IgE, ce qui contribue Ă l’apparition de symptĂ´mes de l’asthme.
Certains des gènes liés à l’IgE ont été décelés dans les cellules éosinophiles. Les chercheurs ont donc séparé les cellules éosinophiles du sang de 24 sujets pour ensuite cibler chacun des 34 gènes entraînant l’incidence la plus marquée auprès d’individus asthmatiques présentant des taux élevés d’IgE. Les globules blancs de sujets issus de familles asthmatiques de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, au Québec, ont été utilisés afin de vérifier la validité d’analyses d’échantillons menées auprès de familles résidant au Royaume-Uni.
Les chercheurs de McGill Mark Lathrop, Elin Grundberg, Stephan Busche et Tomi Pastinen figurent parmi les coauteurs de l’étude.
Les fonds principaux consentis pour la réalisation de cette étude proviennent du Freemasons’ Grand Charity, du Wellcome Trust et de subventions du gouvernement du Québec.
L’article « An epigenome-wide association study of total serum immunoglobulin E concentration » a été publié en ligne le 18 février 2015 dans la revue spécialisée Nature.
DOI : 10.1038/nature14125Â