Approvisionnement en eau dans les grandes villes
À l’heure où un nombre sans cesse croissant de personnes s’établissent en milieu urbain, les villes de toutes les régions du monde connaissent des problèmes d’approvisionnement en eau et cherchent de nouvelles sources pour soutenir leur croissance.
Selon les estimations de la première base mondiale de donnĂ©es sur les sources d’eau et le stress hydrique en milieu urbain, parues cette semaine dans la publication Global Environmental Change, les villes dĂ©placent 504Ěýmilliards de litres d’eau sur une distance de 27Ěý000Ěýkilomètres chaque jour. Mis bout Ă bout, ces canalisations et tuyaux traverseraient la moitiĂ© de la circonfĂ©rence de la Terre. Comme les grandes villes n’occupent qu’un pour cent de la superficie des terres Ă©mergĂ©es de la planète et que les bassins hydrographiques qui les alimentent couvrent 41Ěý% de cette surface, la qualitĂ© de l’eau brute dont elles ont besoin est tributaire de l’utilisation des terres sur cette surface beaucoup plus vaste.
Une Ă©quipe internationale de chercheurs de neuf institutions, dont l’UniversitĂ© McGill, Ă MontrĂ©al, a Ă©tudiĂ© et cartographiĂ© les sources d’alimentation en eau de plus de 500Ěývilles, permettant ainsi pour la première fois d’avoir un aperçu des infrastructures hydrauliques mondiales qui desservent les plus grandes villes de la planète. Cette Ă©tude a Ă©tĂ© dirigĂ©e par RobĚýMcDonald, maĂ®tre de recherche auprès de la Nature Conservancy Ă Arlington, en Virginie.
Le professeur BernhardĚýLehner et le doctorant GĂĽntherĚýGrill, du DĂ©partement de gĂ©ographie de l’UniversitĂ© McGill, ont fourni une carte du monde dĂ©taillĂ©e des fleuves, des lacs et des bassins hydrographiques permettant de cartographier les sources d’approvisionnement en eau de chaque ville, tandis que le professeur ThomasĚýGleeson, du DĂ©partement de gĂ©nie civil de McGill, a rĂ©alisĂ© une analyse des nappes phrĂ©atiques.
L’équipe de chercheurs a eu recours Ă des modèles informatiques afin d’estimer l’utilisation des eaux en fonction de la population et des types d’industrie pour chaque ville, et dĂ©fini les villes soumises Ă un stress hydrique comme Ă©tant celles utilisant au moins 40Ěý% de l’eau disponible. Les estimations prĂ©cĂ©dentes relativement au stress hydrique reposaient uniquement sur le bassin hydrographique de chaque ville, mais de nombreuses municipalitĂ©s puisent largement dans des bassins situĂ©s bien au-delĂ de leurs frontières. En fait, enĚý2010, les 20Ěýplus importants transferts d’eau entre bassins totalisaient au-delĂ deĚý42Ěýmilliards de litres d’eau par jour, soit l’équivalent du volume deĚý16Ěý800Ěýpiscines olympiques.
Ces rĂ©sultats sont porteurs d’une bonne nouvelle, puisque de nombreuses villes ne connaissent pas de problèmes d’approvisionnement en eau aussi criants qu’on le croyait. Ainsi, des analyses prĂ©cĂ©dentes estimaient Ă 40Ěý% environ le nombre de villes soumises Ă un stress hydrique, alors que cette nouvelle Ă©tude rĂ©duit cette proportion Ă 25Ěý%.
Selon les résultats de l’étude, les dix plus grandes villes aux prises avec des problèmes d’approvisionnement en eau sont Tokyo, Delhi, Mexico, Shanghai, Beijing, Calcutta, Karachi, Los Angeles, Rio de Janeiro et Moscou. Aucune des deux villes canadiennes analysées, soit Toronto et Montréal, n’est soumise à un stress hydrique selon la définition utilisée par les chercheurs.
L’étude permet Ă©galement de comprendre que les ressources financières et les ressources hydriques sont Ă©troitement liĂ©es. Une ville peut se dĂ©velopper malgrĂ© la raretĂ© de l’eauĚý‒Ěýsoit en pompant l’eau sur des distances de plus en plus grandes, soit en investissant dans des technologies comme le dessalementĚý‒, mais un grand nombre de villes qui connaissent un essor rapide sont Ă©galement soumises Ă un stress Ă©conomique et peuvent difficilement assurer un approvisionnement suffisant en eau Ă leurs citoyens sans recourir Ă l’aide et aux investissements internationaux.
«ĚýĂ€ l’instar des plantes profondĂ©ment enracinĂ©es, les villes peuvent composer avec une distance assez grande pour trouver l’eau dont elles ont besoin, affirme Rob McDonald. Toutefois, les villes les plus pauvres doivent s’engager dans une vĂ©ritable course contre la montre pour construire les infrastructures hydrauliques leur permettant de rĂ©pondre aux besoins de leur population sans cesse croissante.Ěý»
Voici d’autres conclusions de l’étudeĚý:
•ĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚý Dans les grandes villes, quatre citadins sur cinq (78Ěý% ou quelque 1,21Ěýmilliard de personnes) dĂ©pendent principalement des eaux de surface. Les autres dĂ©pendent des eaux souterraines (20Ěý%) ou, rarement, du dessalement (2Ěý%).
•ĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚý Les infrastructures hydrauliques des grandes villes fournissent conjointement 668Ěýmilliards de litres d’eau chaque jour. De ce nombre, 504Ěýmilliards proviennent des eaux de surface et sont acheminĂ©s sur une distance totale de 27Ěý000Ěýkilomètres.
•ĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚý L’utilisation des terres dans les surfaces contributives en amont a une incidence sur la qualitĂ© et la quantitĂ© de l’eau brute provenant de sources de surface.
•ĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚýĚý Environ le quart des grandes villes qui connaissent des problèmes d’approvisionnement en eau reprĂ©sentent une activitĂ© Ă©conomique de l’ordre de 4,8Ěýtrillions de dollars, soit 22Ěý% de l’activitĂ© Ă©conomique des grandes villes Ă l’échelle mondiale. Cette activitĂ© Ă©conomique dans les grandes villes soumises Ă un stress hydrique vient souligner l’importance d’assurer la gestion durable de ces sources, tant pour la viabilitĂ© des villes que pour l’économie mondiale.
Ces travaux ont Ă©tĂ© financĂ©s par une subvention de la Fondation Gordon et BettyĚýMoore.
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Water on an urban planet: urbanization and the reach of urban water infrastructure, Robert.ĚýI.ĚýMcDonald et coll., Global Environmental Change, publiĂ© en ligne le 2ĚýjuinĚý2014.
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