Un simple coup d’œil leur a permis de constater l’ampleur de la tâche.
Créé par trois étudiants mcgillois, le groupe des « pionniers du recyclage » a enfilé des gants et a examiné les ordures et le recyclage de la cafétéria du Pavillon de génie McConnell.
Ils ont alors constaté que de nombreuses matières recyclables avaient été jetées dans les bacs de déchets et inversement.
Les étudiants souhaitent améliorer les habitudes de tri sur le campus du centre-ville de l’Université McGill. Le mois dernier, ils ont installé un prototype de leur poubelle intelligente dans le Pavillon Lorne‑M.‑Trottier.
Ils utilisent un îlot de tri à compartiments multiples – un pour les déchets (destinés à la décharge), un pour le compostage et deux pour le recyclage (dont un réservé au papier et au carton, et l’autre aux autres matières recyclables, comme le plastique, le métal et le verre) – offert par l’unité Bâtiments et terrains.
Le prototype est muni de capteurs qui mesureront le poids et le volume des poubelles.
« Avec ce projet, notre objectif est d’inculquer aux gens les bonnes pratiques de recyclage et de les encourager à poursuivre leurs efforts en leur fournissant des renseignements en temps réel sur le contenu des poubelles », indique Kirk Lau, doctorant en génie des matériaux.
Un diagnostic en temps réel
Dans cette optique, les usagers verront de l’information, comme l’état des poubelles ou des rappels sur les bonnes pratiques de tri, s’afficher en temps réel sur un écran placé au-dessus des poubelles.
« Selon moi, l’intérêt de ce projet est qu’il nous force, données à l’appui, à remettre en question nos habitudes de tri – chose que nous avons tendance à négliger lorsqu’une action devient un quasi-automatisme –, et qu’il nous rappelle que celles-ci ont des répercussions sur l’environnement, » ajoute Misghana Kassa, qui a obtenu son baccalauréat en sciences en 2020.
Selon Kendra Pomerantz (B.A. 2014), superviseure à l’unité Bâtiments et terrains, qui a travaillé en étroite collaboration avec les étudiants sur le projet, cette méthode visant à offrir un diagnostic et des données quantitatives en temps réel est un moyen efficace de modifier le comportement.
Le projet étudiant a vu le jour dans le cadre du programme affilié à la Faculté des sciences de l’éducation goLEAD, qui offre aux étudiants de toutes facultés confondues la possibilité de développer leur leadership en s’attaquant à des problèmes concrets. « Et c’est nous qui avons remporté le concours d’étude de cas! », se réjouit Simina Alungulesa, titulaire d’un baccalauréat en génie de 2018 et étudiante à la maîtrise en génie chimique.
Simina Alungulesa, Kirk Lau et Misghana Kassa ont poursuivi leurs travaux (Arneet Kalra s’est joint à eux récemment), soutenus par le Fonds des projets de durabilité de McGill qui leur a octroyé 3 000 $. Ce dernier offre de l’aide au démarrage de projets qui contribuent à l’avènement d’une culture de développement durable à l’Université.
Les étudiants ont été mis en relation avec Kendra Pomerantz, pour qui le projet était en adéquation avec les autres travaux menés par l’unité Bâtiments et terrains. « Nous sommes parvenus à créer cette belle synergie », se réjouit la superviseure.
L’une des clés de voûte de la stratégie d’amélioration de la gestion des déchets de l’unité Bâtiments et terrains consiste à retirer progressivement les poubelles isolées des couloirs des principaux bâtiments de l’Université pour les remplacer par des îlots de tri standardisés à trois ou quatre compartiments, explique-t-elle.
De meilleures habitudes de tri
Les « pionniers du recyclage » ont sollicité l’aide des étudiants du Département de génie mécanique pour la conception du prototype.
Arneet Kalra, étudiant en génie logiciel, s’est joint au groupe cet été grâce à la création d’un poste par le programme de stage du Centre McGill Engine. Ce projet lui a permis de parfaire ses compétences de création logicielle et a même influencé ses habitudes de recyclage.
« J’ai commencé à mettre en pratique chez moi ce que j’avais appris, à composter et à recycler davantage, et à éviter la contamination croisée », raconte-t-il.
Dans quel piège les gens tombent-ils souvent, convaincus qu’un déchet peut être recyclé alors qu’il ne l’est pas?
« Les boîtes de pizza souillées de gras », affirme Kirk Lau sans hésitation.
« C’est exact, renchérit Simina Alungulesa. Au même titre que tous les autres déchets en carton souillés par des aliments. » Selon Kendra Pomerantz, les gobelets de café seraient l’un des « principaux coupables ».
Elle explique que, sur le campus, le café est vendu dans des gobelets compostables, mais que les gobelets en papier provenant de Starbucks ou de Tim Hortons doivent être jetés dans les bacs de déchets non recyclables et non compostables. Les gens jettent souvent leurs gobelets non recyclables (avec un fond de café, pour couronner le tout) dans le compartiment réservé au recyclage du papier. Or, ce n’est pas là qu’ils vont. Lorsque le café se répand sur le papier, nous sommes parfois contraints de jeter le sac de recyclage au complet parce qu’il a été contaminé.
Le remplissage des différents compartiments scruté à la loupe
Les données recueillies par la poubelle intelligente aideront l’unité Bâtiments et terrains à mieux comprendre le comportement des usagers à l’égard de ses îlots de tri.
« L’installation des îlots a commencé. Je pense que ce sera fort intéressant! Nous pourrons comparer la vitesse à laquelle se remplissent les différents compartiments », dit Kendra Pomerantz.
« Les compartiments des déchets, du recyclage et du compostage se remplissent-ils de manière proportionnelle à la vitesse de production des différents matériaux dans le flux des déchets de l’Université, ou constaterons-nous que les gens jettent trop de choses dans le compartiment des déchets? », s’interroge la superviseure.
En outre, l’unité Bâtiments et terrains est responsable de la collecte des déchets. « C’est très utile de connaître la vitesse et les heures auxquelles les bacs se remplissent, notamment pour nous aider à optimiser nos opérations. »
La poubelle intelligente devait être installée dans le Pavillon de génie McConnell. Cependant, la plupart des cours étant offerts à distance cet automne, la poubelle sera finalement installée dans le Pavillon Trottier, où il devrait y avoir un peu plus d’achalandage.
« Le premier prototype s’accompagne toujours d’un processus itératif qui permet de vérifier que tout fonctionne bien, explique Kirk Lau. C’est ce sur quoi nous nous concentrons pour le moment. »