L’ANOREXIE, UNE MALADIE QUI N’EST PAS QUE DANS LA TÊTE, Le Figaro Santé, Dr Steiger
Une vision différente du trouble
«On ne devient pas anorexique parce qu’on est faible mais parce que des évènements de la vie ont déclenché des ressorts génétiques et épigénétiques»
Pr Howard Steiger
Outre la perspective de nouveaux traitements, c’est toute la façon d’aborder la maladie qui peut être repensée. «Cela fait des années que les patients nous disent que ce n’est pas seulement psychologique, notre étude le montre», affirme le Pr Cynthia Bulik, psychiatre à l’Université de Caroline du Nord (États-Unis) qui a coordonné les travaux. «Cette étude nous permet d’envisager l’anorexie non seulement comme un trouble psychiatrique mais aussi physique.» Elle peut aussi rassurer les patients sur la réalité corporelle de leur trouble, et surtout les déculpabiliser. «L’un des aspects clés de l’anorexie mentale est la honte que ressentent les patients et leur entourage», ajoute le Pr Howard Steiger, psychiatre et directeur du programme sur les troubles du comportement de l’Institut Douglas (Université McGill, Canada). «On peut désormais leur expliquer que ce n’est pas leur faute. On ne devient pas anorexique parce qu’on est faible mais parce que des évènements de la vie ont déclenché des ressorts génétiques et épigénétiques.»
Attention toutefois à ne pas sombrer dans le fatalisme. Si certaines familles sont plus fréquemment touchées par les troubles du comportement alimentaire, peut-être à cause de leur patrimoine génétique, il ne s’agit que d’une vulnérabilité. D’autant que la présence de ces huit variations génétiques ne permet de repérer effectivement que 5% des patients. L’anorexie mentale étant multifactorielle, son déclenchement et son maintien font intervenir de nombreux processus biologiques et psychiques. Ainsi, «pour les patients inquiets de la transmission du risque à la descendance, nous rappelons qu’elle reste faible, moins de 5%», insiste le Pr Gorwood. «Les familles peuvent avoir une attention spécifique vis-à -vis de leurs enfants pour les protéger, ou accélérer l’accès aux soins - et donc améliorer le pronostic - si un trouble survient.»